Le tannage végétal, un soin artisanal réservé aux cuirs les plus prestigieux
Pour confectionner l’ensemble de notre gamme de fauteuils et canapés club, nous collaborons avec une mégisserie de renom située dans le Tarn. Fondée en 1898, cette entreprise française et familiale perpétue un précieux savoir-faire centenaire. Sa spécialité ? Le tannage végétal du cuir. La qualité, le respect de l’environnement et l’amour du travail bien fait sont au cœur de leur démarche. Plus qu’une philosophie, c’est un leitmotiv qui façonne leurs méthodes de travail. L’excellence de leurs productions leur a permis de se forger une réputation de renom à travers le monde. Loin de s’enliser dans des procédés archaïques, elle collabore avec des laboratoires de recherche et développement afin d’élaborer de nouveaux produits et techniques de fabrication. Nous vous proposons de découvrir leur atelier et les différentes étapes du tannage des peaux.
C’est quoi, le tannage du cuir ?
Avant que le tanneur ou le mégissier n’intervienne, on ne parle pas encore de cuir, mais simplement d’une peau d’animal. C’est un matériau brut qui n’a pas été traité. À ce stade, il conserve des poils, des résidus organiques et des impuretés. Il est donc particulièrement sujet à la putréfaction.
Sans opération rapide pour stopper ce processus naturel, bactéries et champignons s’en donneront à cœur joie et feront ce qu’elles font toujours : dévorer la matière et la décomposer. Bien heureusement, l’être humain a depuis des siècles trouvé une solution pour traiter, assainir et stabiliser les peaux, c’est le tannage. Grâce à cette opération, la peau de bête va se transformer en cuir solide, imputrescible et résistant à l’eau.
Qu’est-ce qui différencie un tanneur et un mégissier ?
Dans les faits, leur métier est le même. Ils convertissent les peaux en cuir afin de les rendre souples, robustes et durables. La seule différence réside dans la nature et la taille des peaux dont ils s’occupent. En effet, le tanneur travaille uniquement les peaux de grande taille. Il prendra en charge les peaux de veaux, des buffles, de vaches, de chevaux, de taureaux et de taurillons. Ce type de peau est fréquemment employée dans le domaine de l’ameublement, de la sellerie automobile ou nautique.
Le mégissier, lui, prépare les peaux des animaux de petite taille. Il maitrise l’art de transformer les peaux de mouton, d’agneaux, de chèvres ou d’animaux exotiques comme l’autruche, le serpent ou encore le poisson. Cette variété de cuir est couramment utilisée dans l’habillement, la maroquinerie, la ganterie ou le design. En raison de la nature et le format des peaux qu’ils traitent, certains procédés et outils employés par le tanneur et le mégissier diffèrent. Mais au fond, leur travail reste le même : transformer une peau animale brute et périssable en cuir exploitable.
Les deux types de tannage
Tanneurs et mégissiers vont tous deux changer la nature des peaux à l’aide de tannins. Ce sont des substances aux propriétés astringentes qui rendent les cuirs imputrescibles. Ils vont leur donner, grâce à l’utilisation de méthodes spécifiques, plus ou moins de souplesse ou de fermeté. Tout dépendra du souhait du client et de la façon dont sera exploité le futur cuir. On distingue deux techniques différentes : le tannage végétal et le tannage minéral.
Le tannage végétal
Ce procédé séculaire exploite des tanins issus de plantes. Ces substances se trouvent dans les écorces d’arbres (chênes, châtaigniers, mimosas, acacias…), les feuilles, les pépins, les racines ou encore la sève des végétaux. C’est une des plus anciennes formes de travail du cuir. En effet, le tannage végétal fut le premier moyen utilisé par nos ancêtres de la préhistoire pour tanner les peaux. Lorsqu’il perdit ses précieux poils et que les hivers se firent plus rudes, l’homme a rapidement compris l’intérêt de transformer les peaux des animaux qu’il tuait. Le cuir devint indispensable à la survie. Il était employé pour se vêtir, se chausser et construire des habitats pour se protéger des intempéries. Ce type de tannage artisanal est, hélas, de plus en plus rare.
Le tannage minéral
Ce type de tannage emploie des tanins minéraux : sels de chrome, sels de fer, sels de zirconium… Cette technique mondialement répandue est moins coûteuse et plus rapide que le tannage végétal. Elle est aussi de plus en plus décriée. En effet, les produits chimiques auxquels elle a recours sont particulièrement polluants et allergènes. Ce que gagne l’industrie en productivité et en rendement, la société le perd en mettant en péril sa santé et celle de l’environnement.
Les points forts du tannage végétal
Un procédé sain pour l’utilisateur et le tanneur
Le tannage végétal n’emploie aucun composé chimique. Il est sans danger, tant pour le mégissier au contact des peaux que pour le client qui utilisera le cuir. De plus, il ne provoque aucun risque d’allergies, ce qui en fait un produit final particulièrement sain. Comme les tanins sont issus de ressources végétales abondantes, ce type de tannage est plus respectueux de la Terre et de ses trésors. Les déchets rejetés par cette technique sont parfaitement inoffensifs. C’est pour toutes ces raisons que le cuir travaillé par tannage végétal est considéré comme un cuir « écologique ».
En plus d’être une méthode naturelle, le tannage végétal produit un cuir particulièrement sain et solide. Il absorbe l’excès d’humidité, restitue chaleur par temps froid et fraicheur par temps chaud. C’est ce qu’on appelle un « thermorégulateur naturel ». Un tel cuir conserve une excellente tenue dans le temps et a l’avantage de bien vieillir. En effet, il n’aura de cesse de s’embellir au fil des années grâce au développement spontané d’une patine. D’un point de vue esthétique, le cuir traité par tannage végétal possède une teinte riche avec des couleurs profondes et nuancées. De plus, il affiche une délicate brillance nacrée qui le rend unique et authentique.
Le travail préparatoire avant le tannage végétal
Obtenir un cuir fini est un long processus découpé en de nombreuses phases. C’est un savoir-faire ancien qui s’appuie aujourd’hui sur des techniques et des procédés modernes et optimisés. Avant de procéder au tannage à proprement parler, il y a deux étapes importantes : le travail de la peau et le travail dit « de rivière ».
Le travail de la peau
Cette étape consiste à séparer soigneusement la peau de la carcasse de l’animal à l’aide d’outils spécifiques. À ce stade, on parle de « peau fraîche ». Elles sont particulièrement fragiles et périssables, il est donc crucial de les préparer rapidement. 75 % du poids de ces peaux est constitué d’eau. Sans intervention humaine, elles se détérioreront en quelques heures à peine. La cause ? Le développement des microbes et bactéries qui s’empressent de la coloniser. Pour stopper leur action et empêcher la dégradation de la matière, il faut déshydrater la peau.
Le salage, une étape qui assèche et conserve
Les peaux sont rapidement enveloppées d’une épaisse couche de sel. Elles sont ensuite empilées les unes sur les autres. De la saumure va s’écouler des piles ainsi entassées. Grâce à son pouvoir corrosif, elle élimine au passage une partie des déchets et des éléments organiques. L’excédent de sel est retiré, puis les peaux sont suspendues à l’air libre ou en étuve afin de les sécher. À cette étape, on parle de « peau brute ».
Avant d’être vendues, elles sont soumises à l’œil expert de professionnels. Ces derniers vont trier les peaux en fonction de leur qualité, leur taille, leur épaisseur, ou encore le sexe ou le poids de l’animal qu’elles recouvraient. Une fois classifiées, elles sont présentées à des négociants ou des collecteurs de peaux brutes qui les proposeront à leur clientèle. Parmi eux, bien évidemment, les tanneurs et les mégissiers.
Bon à savoir
Contrairement aux croyances populaires, les animaux ne sont pas tués pour leur peau. En réalité, c’est un déchet de l’industrie de la viande que les mégisseries récupèrent et valorisent. Sans l’exploitation du cuir, elle ne serait qu’un rebut de plus à traiter et à éliminer. Ainsi, la fabrication du cuir, quand elle respecte le cadre réglementaire, fait partie d’un cercle vertueux et écologique.
Le travail de rivière
Cette étape est constituée de plusieurs sous-étapes permettant de préparer la peau à recevoir le tannage.
Le travail de rivière consiste à tremper les peaux dans un grand volume d’eau afin de :
- Les réhydrater ;
- éviter leur putréfaction ;
- les nettoyer.
À ce stade, les peaux conservent encore de nombreuses impuretés. Ce lavage en profondeur va les supprimer et favoriser l’imprégnation des agents tannants.
La trempe ou reverdissage
Les peaux sont immergées dans des cuves d’eau mélangées à de l’antiseptique (afin d’éviter la putréfaction) durant plusieurs heures. La trempe supprime les saletés comme la boue, le sang, la graisse et autres résidus. Elle permet aussi d’ôter les restes de substance soluble ajoutée au moment du salage des peaux pour leur conservation. Une étape qui a la fâcheuse tendance à rigidifier le cuir.
Le but est donc de réhydrater les peaux au passage, afin qu’elles regagnent de la souplesse. Une fois la trempe achevée, la peau retrouve un taux d’hydratation proche de celle qu’elle avait lorsqu’elle était fraiche. Grâce au gonflage de la peau par l’eau et à l’action mécanique des pales en rotation dans le tonneau, une grande partie des poils fixés dans l’épiderme vont tomber.
Épilage et pelanage
Les peaux sont une nouvelle fois immergées dans une cuve tournante remplie d’une solution alcaline. Les fibres vont se relâcher et, grâce à l’action d’une préparation liquide spécifique, la kératine sera dissoute, supprimant les derniers poils encore accrochés.
Vient ensuite le pelanage qui consiste à altérer très légèrement les fibres de la peau. Elle sera ainsi plus perméable et réceptive aux agents tannants avec lesquels elle sera en contact ultérieurement. Cette étape permet également de redonner de la souplesse au cuir et de valoriser la fleur, c’est-à-dire la qualité et l’aspect général du futur cuir.
L’Écharnage et le rinçage
Chaque peau est passée individuellement dans une écharneuse. Celle-ci se charge d’éliminer les tissus sous-cutanés, mais du côté de la chair, cette fois.
Enfin, la peau est abondamment rincée puis essorée. C’est la dernière étape.
À la fin de ce travail de rivière, de la peau d’origine, il ne reste que le derme, enfin prêt pour le tannage.
Le saviez-vous ?
Au temps de nos ancêtres, le travail de rivière était traditionnellement réalisé directement dans le lit d’une rivière, d’où son appellation. La mégisserie de Mazamet, avec laquelle nous œuvrons, est idéalement situé près de la rivière le Thoré. Ce cours d’eau, ayant peu de calcaire, convenait parfaitement à ce travail. De nos jours, ces étapes s’effectuent dans de grandes cuves au sein de leur atelier. Cette évolution leur permet d’avoir un contrôle optimal du processus.
Les différentes étapes du tannage végétal
Les tannins végétaux
Chaque artisan choisi des tannins végétaux selon l’espèce animale traitée, mais aussi en fonction des propriétés qu’il souhaite donner au cuir (brillance, souplesse …). Notre mégisserie partenaire utilise principalement des écorces de québracho et de mimosas.
Le trempage des peaux
Cette étape consiste à plonger la peau dans de grandes cuves circulaires appelées « foulons de tannerie ». Ces derniers contiennent les tanins qui pénètreront les fibres de l’épiderme pour les modifier en profondeur. Contrairement aux procédés industriels, le trempage exige du temps. En effet, elle nécessite quelques jours à plusieurs mois.
Cette méthode ancestrale produit des cuirs plutôt fermes, parfaits pour la fabrication des fauteuils et canapés club. Au sortir de cette opération, il est désormais possible de parler de cuir et non plus de peau. Le cuir de mouton ainsi obtenu est appelé la basane.
Le Corroyage
Cette étape se décompose en plusieurs phases.
L’essorage : effectué à l’aide d’une presse ou de machines à cylindres de feutre. Sous l’effet de la pression paramétrée par le tanneur, le cuir perd à nouveau une grande partie de son eau.
La mise au vent : les peaux sont suspendues durant 24 à 48 h afin de les égoutter et les sécher. Le cuir redevient assez rigide.
Le refendage : on divise le cuir en deux feuilles. Celle du dessous, qui était en contact avec la chair, est appelée « croute de cuir ». Celle du dessus, côté externe, c’est la précieuse fleur du cuir. C’est un produit haut de gamme que nous utilisons dans la confection de nos fauteuils et canapés club.
Le dérayage : la peau est aplatie pour lui donner une épaisseur homogène, la débarrasser des excès et des parties indésirables.
La mise en humeur : on humidifie la peau afin de la préparer à l’étape suivante.
Le palissonage : une pression plus ou moins forte est exercée sur le cuir placé entre deux rouleaux tremblotant afin d’assouplir la matière qui avait perdu de sa souplesse lors de la mise au vent.
À savoir
Notre mégissier respecte la norme REACH. Celle-ci certifie que les colorants ou autres produits nécessaires pour le tannage sont validés par les autorités françaises et européennes en matière de sécurité. De plus, il possède sa propre station de traitement des eaux et utilise une chaudière à bois pour chauffer ses bâtiments. Ces actions permettent à la mégisserie de limiter son empreinte carbone.
Le finissage du cuir
Afin d’augmenter sa souplesse et sa durée de vie, le cuir est nourri. Il est fin prêt, ne reste que les finitions. Elles dépendront de l’usage prévu (ameublement, maroquinerie, etc..), et des demandes particulières des clients du mégissier. Il est également possible de teinter le cuir avec une immense variété de couleurs. Pour y parvenir, le cuir est immergé successivement dans des bains de teinture contenant divers colorants. La teneur en pigment et le nombre de bains dépendront de la couleur et de l’intensité que l’on souhaite donner au cuir. Ils sont colorés de façon uniforme et plus ou moins en profondeur.
En fonction du rendu final recherché, le cuir peut se voir appliquer un satinage, un lissage ou même un grainage. En effet, lors du tannage, la peau perd son grain originel. Pour fixer de tels effets, la pièce de cuir est placée dans une presse avec des plaques lisses ou gravées qui sont chauffées. Elles sont alors compressées contre le cuir afin d’y gaufrer le motif désiré. Ce peut être des rides, des dessins en relief, ou encore un aspect croco. Cette technique permet de donner de façon permanente un grain artificiel au cuir, y apporter des ornements, un pictogramme ou même des phrases écrites. Les possibilités sont presque infinies. Le mégissier a donc le pouvoir de modifier la brillance, la couleur, le toucher et même le relief du cuir qui passe entre ses mains. La basane ainsi obtenue est désormais prête à habiller canapés et fauteuils club de prestige.
Et n’oubliez pas, pour conserver un beau cuir souple et éclatant pendant longtemps, pensez à l’entretenir avec soin !